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Manger
24 juin 2013

Malthus passe à table

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On a longtemps cru que les sombres prévisions de Thomas Malthus (1766-1834) ne se vérifieraient pas et que les progrès de la productivité agricole devanceraient toujours ceux de la démographie.

Il est temps de déchanter.

Un peu partout dans le monde, les agriculteurs les plus modernes butent désormais sur un palier de productivité impossible à dépasser. Après une période d'amélioration des rendements, les intrants (*) naturels ou chimiques deviennent contre-productifs. La standardisation des cultures et des écosystèmes, l'usage des pesticides, herbicides et engrais chimiques et la répétition des récoltes sur une même terre sans assolement (*) appauvrissent les sols et produisent des phénomènes d'érosion et de baisse de fertilité. Ils menacent également la survie d'insectes pollinisateurs, comme les abeilles ou les bourdons. Pour la santé humaine enfin, l'utilisation de produits chimiques de synthèse aboutit à disperser dans l'environnement et les aliments des molécules cancérogènes ou des perturbateurs pour les systèmes nerveux, immunitaires ou endocriniens.

Produire des aliments sains pour davantage de monde à partir de terres agricoles moins fertiles, cette équation déjà difficile deviendra impossible si davantage d'humains adoptent le régime alimentaire carné des pays occidentaux. De 34 kg de viande par an et par personne en 1992, la consommation moyenne mondiale de viande est passée à 43 kg aujourd'hui, d'après le PNUE. Or, produire une protéine animale nécessite beaucoup plus de terres, d'eau, d'engrais et de travail que la production d'une protéine végétale. D'après la FAO, il faut entre 3 kg et 10 kg de protéines végétales pour nourrir le bétail et produire en bout de chaîne un seul kilo de protéines animales.

Mais pour nourrir l'humanité, il faut avant tout des terres. Or, elles sont l'objet d'une compétition de plus en plus féroce pour des usages en concurrence, que l'on résume souvent en anglais par 4F : food, pour nourrir les humains, feed, pour nourrir le bétail, forest, pour conserver les forêts et les puits de carbone, et fuel, pour produire de l'énergie à base d'agrocarburants. Développer au rythme actuel les fonctions de feed et de fuel se fera nécessairement au détriment des deux autres fonctions, pourtant vitales pour nourrir demain 10 milliards d'êtres humains et préserver le climat et la biodiversité. D'ores et déjà, la surface totale des terres agricoles disponibles sur Terre stagne depuis 1991 et est même repassée sous les 1,4 milliard d'hectares.

 

* Intrants : engrais, pesticides, produits pour le bétail, etc. nécessaires à la production agricole.

* Assolement : division des terres d'une exploitation agricole en parties distinctes (des soles), consacrées chacune à une culture donnée pendant une saison culturale. Avec en général une rotation des cultures entre les soles, d'une année ou d'une saison à l'autre, afin de limiter l'appauvrissement du sol.

 


Manuel Domergue
Alternatives Economiques Hors-série n° 097 - avril 2013

 

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Commentaires
C
Bonjour,<br /> <br /> <br /> <br /> Je partage votre inquiétude, bien sûr.<br /> <br /> Mais 9, 10, 11, ou 12 milliards d'êtres humains sur Terre, ça ne change pas grand chose.<br /> <br /> Si 8 milliards ont le même régime alimentaire, les mêmes habitudes de consommation, les mêmes moyens de transport, etc. que les États-uniens ou les Européens !<br /> <br /> Quant à «alerter» les êtres humains et leur «conseiller de modérer leur procréation», il ne me semble pas que les «institutions internationales» puissent en être capables même à moyen terme.<br /> <br /> En effet, elles sont, PAR NATURE, l'émanation des états. Et combien d'états sont, de façon plus ou moins directe, dirigés par des groupes religieux ?<br /> <br /> Sur la question de la procréation, le nouveau pape suit les traces de ses prédécesseurs.<br /> <br /> Il me semble plutôt que l'éducation (des filles en particulier) et le développement économique soient efficaces.<br /> <br /> Moins il y a à manger, plus les peuples font d'enfants, et le développement économique entraîne toujours une baisse de la natalité - même si à très court terme la population augmente grâce à la baisse de la mortalité enfantine.<br /> <br /> <br /> <br /> Voir ceci en kiosque :<br /> <br /> <br /> <br /> http://www.alternatives-economiques.fr/pics_bdd/produit_visuel/1367570842_001-COUVERTURE.jpg<br /> <br /> <br /> <br /> Bonne journée !
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M
En fait, ça n'est plus 10 milliards que nous devrions être en 2100, mais pratiquement 11 milliards (10,9 "exactement" selon les dernières projections de l'ONU du 13/06/2013). <br /> <br /> Il est bien évident qu'avec un tel effectif, nous courrons à la catastrophe, que ce soit au niveau alimentaire, climatique ou énergétique... Il serait donc temps que les institutions internationales alertent les êtres humains et leur conseillent de modérer leur procréation.
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